Le pacte « Dutreil » (article 787 B du CGI) permet de réaliser une transmission en bénéficiant d’une exonération de 75% de la valeur des titres d’une société développant une activité opérationnelle (industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale). Si la société développe également une activité non opérationnelle (ex. : civile) le bénéfice du Dutreil reste possible si celle-ci n’est pas prépondérante. Le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 23 janvier 2020 vient de le confirmer et d’annuler la doctrine administrative qui encadrait trop restrictivement les critères de cette prépondérance.
Le pacte Dutreil doit porter sur les titres d‘une société ayant une activité (principalement) opérationnelle
La loi vise les sociétés ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, (en un mot opérationnelle).
Elle ne précise pas que l’activité opérationnelle doit être exclusive et ne prévoit pas, pas plus que les travaux parlementaires, l’hypothèse d’une société qui développe une activité à la fois opérationnelle et civile (activité mixte).
L’administration fiscale a alors indiqué au sein d’une réponse ministérielle Bobe d’octobre 2006, qu’il n’était pas exigé, pour l’application du dispositif Dutreil, que la société exerce exclusivement une activité opérationnelle, à la condition que celle-ci soit prépondérante.
Cette réponse a été intégrée dans sa doctrine (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 §20) qui exigeait, pour caractériser cette prépondérance, la réunion de deux critères cumulatifs :
- 1/ le chiffre d’affaires procuré par l’activité opérationnelle doit représenter au moins 50% du CA total et ;
- 2/ le montant de l’actif brut immobilisé (immeubles, titres de participation etc.) doit représenter au moins 50% de l’actif brut total.
Le Conseil d‘Etat recadre l‘administration fiscale en annulant sa doctrine relative aux activités mixtes
Le Conseil d’Etat dans l’arrêt du 23 janvier 2020 confirme qu’une société exerçant une activité mixte peut bénéficier du pacte Dutreil, sous réserve que l’activité opérationnelle soit prépondérante.
En l’espèce, le contribuable réalisait via une SAS une activité de marchand de biens (activité commerciale) et de location d’immeubles nus (activité civile) – soit une « activité mixte ». Les immeubles acquis en vue de leur revente (activité commerciale) étaient comptabilisés en stock (actif circulant), alors que les immeubles loués nus constituaient l’actif immobilisé.
L’actif circulant étant supérieur à l’actif immobilisé, le second critère de la doctrine n’était pas respecté et donc la transmission sous le bénéfice du régime Dutreil impossible, alors même que l’activité principale de la société (marchand de biens) était opérationnelle !
Le Conseil d’Etat précise alors que le second critère retenu par l’administration méconnaît le sens et la portée de l’articl e 787 B du CGI – puisque la faiblesse ou l’importance de l’actif immobilisé ne présage en rien de la réalisation d’une activité civile ou commerciale : le paragraphe de la doctrine administrative reprenant les deux critères est annulé !
Quel critère retenir désormais pour caractériser la prépondérance de l’activité opérationnelle ?
L’arrêt précise que cette prépondérance doit s’apprécier « en considération d’un faisceau d’indices déterminés d’après la nature de son activité et les conditions de son exercice » sans préciser ces indices.
Un des critères à retenir pourrait être la part dans la valeur totale de l’actif brut, des actifs affectés à une activité opérationnelle (i.e. à leur valeur vénale), critère déjà retenu (CE 13 juin 2018 n°395495) mais également le chiffre d’affaires dégagés par l’activité opérationnelle, qui reste pertinent pour les sociétés opérationnelles (critère non critiqué par le Conseil d’Etat).
Plus largement, l’activité opérationnelle de la société (moyens d’exploitation, salariés) devra être comparée aux sociétés du même secteur qui réalisent une activité exclusivement opérationnelle.
Le pacte Dutreil permet une exonération de 75% de la valeur des parts transmises !
Cette exonération de 75% (cas d’une donation ou succession) est notamment conditionnée aux trois conditions suivantes, simplement résumées :
- Le donateur (ou le défunt) doit avoir souscrit, avec d’autres associés, un engagement collectif de conservation portant sur les droits sociaux transmis (donation ou succession) pour une durée minimale de 2 ans en cours au jour de la transmission (minimum de 17% de droits financiers et 34% de droits de votes) ;
- Chacun des donataires ou héritiers doit lui-même prendre l’engagement individuel (dans l’acte de donation ou de succession) de conserver ces droits pendant 4 ans, à l’issue de la période de 2 ans ;
- L’un des signataires de l’engagement collectif de conservation doit exercer une fonction de direction dans la société dont les titres sont transmis (cela peut-être le donateur).
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Veille fiscale - du 1er au 31 octobre 2020 - Blog du Contentieux fiscal
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