Plus-value immobilière, Résidence principale, Droits d’enregistrement & engagement de revendre, Revenus fonciers & absence de location, Scellier, Robien & rupture conventionnelle, Acte anormal de gestion & abandon de créances, Majoration du prix d’acquisition, Cession d’usufruit temporaire & distribution occulte
Marie-Bénédicte Pain, Pierre Darbo, Bérénice Binazet, Lucas Thieurmel, Quentin Seyrat et Alina Ananyev
Retrouvez la veille fiscale du 1er au 30 avril 2021 réalisée par l’équipe de contentieux fiscal du cabinet Rivière│Avocats│Associés
Plus-value immobilière – Résidence principale : l’occupation très brève peut faire obstacle à l’exonération
Pour rappel, la plus-value réalisée lors de la vente du logement constituant la résidence principale du vendeur au jour de la cession est exonérée d’impôt sur le revenu (article 150-U-II-1° du CGI).
Le juge de l’impôt et l’administration fiscale peuvent toutefois contester la qualité de résidence principale de l’immeuble cédé afin de faire obstacle à l’application de cette exonération.
Dans sa décision du 1er avril 2021, la CAA de Nantes écarte la notion de résidence principale de l’immeuble occupé par le cédant en recourant à la méthode du faisceau d’indices. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA de Nantes, 1er avril 2021, n°19NT03708
Droits d’enregistrement – L’engagement de revente entrainant une taxation au taux réduit suppose une intention spéculative réelle qui s’apprécie au moment de l’acquisition
L’article 1115 du CGI prévoit qu’un assujetti à TVA qui achète un immeuble et prend l’engagement de le revendre dans les cinq ans est redevable de droits d’enregistrement à taux réduit (0,70% au lieu de 5,80%).
Dans son arrêt du 12 avril 2021, la Cour d’Appel d’Orléans a précisé les contours de ce régime de faveur, rappelant qu’il supposait que l’opération ait été réalisée avec une intention spéculative réelle et non seulement affichée, laquelle doit pouvoir être justifiée au moment de l’acquisition. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CA Orléans, 12 avril 2021, Ch. Civ., n°19/01250
Revenus fonciers – L’interruption des travaux et l’absence de location du bien peut entrainer la non-déductibilité des charges foncières
En application de l’article 15 II du CGI, les contribuables qui se réservent la jouissance de logements dont ils sont propriétaires ne peuvent pas déduire de leur revenu imposable les charges afférentes à ces logements.
Dans le prolongement de cette règle, la CAA de Nantes, par un arrêt en date du 1er avril 2021, rappelle que seuls les intérêts d’emprunt contractés pour l’acquisition d’un immeubles destinés à procurer des revenus fonciers sont déductibles (combinaison des articles 13, 28, 31 et 156 du CGI) et rejette leur déductibilité pour un bien non loué du fait du non-achèvement des travaux, l’entreprise ayant été mise en liquidation. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA Nantes, 1er avril 2021, n° 19NT03121
Scellier et VEFA – Pas de réduction d’impôt en l’absence du paiement complet du prix d’acquisition à l’achèvement des travaux !
En application de l’article 199 septvicies du CGI, les contribuables ayant acquis entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012 des logements neufs ou en l’état de futur achèvement destinés à la location peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt dite « Scellier » répartie sur neuf ans.
Pour rappel, la vente en l’état futur d’achèvement est le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l’acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l’acquéreur au fur et à mesure de leur exécution. L’acquéreur est tenu d’en payer le prix à mesure de l’avancement des travaux (BOI-IR-RICI-230-10-30-10 n° 70).
Par un arrêt en date du 15 avril 2021, la CAA de Nantes rappelle que dans le cas d’un logement acquis en l’état de futur achèvement la date d’acquisition du bien conditionne l’ouverture du droit à la réduction d’impôt Scellier sous réserve que le prix de l’acquisition soit entièrement payé à la fin des travaux. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA de Bordeaux, 11 mars 2021, n°19BX03099
Dispositif « Robien » – Une rupture conventionnelle ne saurait dispenser le contribuable de son engagement de mise en location
Pour rappel, le dispositif « Robien », codifié à l’article 31, I, h, 1° du CGI permet d’amortir une partie du prix de revient de certains biens (neufs, réhabilités ou transformés) sur les revenus fonciers.
La contrepartie de cet avantage réside dans l’engagement de location nue pris par l’acquéreur au bénéfice d’un locataire qui en fait sa résidence principale. A défaut du respect de cet engagement, la sanction est la reprise de l’amortissement depuis l’origine.
Il existe toutefois des exceptions à cette remise en cause notamment en cas de décès ou de licenciement.
Dans notre arrêt, les contribuables avaient cédé leur bien pendant la période d’engagement de location, rompant ainsi ce dernier.
Pour contester le redressement qui en avaient résulté, ils estimaient que la rupture conventionnelle du contrat de travail d’un des époux leur permettait de se prévaloir de l’exception à la remise en cause de l’avantage fiscal prévue par la loi en cas de licenciement.
La Cour administrative d’appel dans un arrêt du 15 avril 2021 confirme qu’une rupture conventionnelle ne peut être assimilée à un licenciement. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA de Versailles 15 avril 2021, n°19VE02526
Acte anormal de gestion – La preuve du caractère anormal d’un abandon de créances est rapportée par l’administration lorsque la société ne justifie pas de l’existence de contreparties à l’abandon (absence de refacturation de charges)
Les prêts sans intérêts ou abandons de créances accordés par une entreprise au profit d’un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d’une gestion commerciale normale, sauf s’il apparait qu’en consentant de tels avantages, l’entreprise agit dans son propre intérêt. Par ailleurs, s’il appartient à l’administration d’apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu’un abandon de créances ou d’intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n’est pas en mesure de justifier qu’elle a bénéficié en retour de contreparties.
C’est ce que rappelle la CAA de Nantes dans son arrêt du 15 avril 2021 à propos d’une société propriétaire des murs d’une galerie commerciale qui s’est abstenue pendant plusieurs années de refacturer les charges d’entretien et de fonctionnement dont elle était fondée à réclamer le paiement à ses locataires et qui, s’en étant rendu compte, avait opéré un rappel en 2010 auprès du seul occupant principal. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA Nantes 1 avril 2021 n°19NT02478
Acte anormal de gestion – La charge de la preuve du caractère anormal d’une location consentie à bas prix incombe à l’administration fiscale
En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du CGI, le bénéfice imposable à l’IS est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l’entreprise, à l’exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale.
Une charge anormale peut donc être réintégrée et un produit anormalement bas majoré.
Constitue un acte anormal de gestion, l’acte par lequel une entreprise décide de s’appauvrir à des fins étrangères à son intérêt.
Il appartient à l’administration, qui n’a pas à se prononcer sur l’opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d’établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.
Dans un arrêt récent, le Conseil d’État a estimé qu’une CAA a commis une erreur de droit en n’ayant pas recherché si l’administration démontrait la pertinence du taux de rendement de 4% appliqué sur la valeur vénale d’une villa louée à un associé. Le CE relève qu’il incombait à l’administration d’établir le caractère anormalement bas du loyer consenti, alors que la société requérante soutenait que ce taux ne correspondait pas au rendement réel d’un immeuble tel que l’immeuble concerné.
Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
Conseil d’État 8 mars 2021 n°433019
Plus-value immobilière et société de personnes – En cas de cession de parts de SCI, les travaux sur un immeuble figurant à son actif ne peuvent venir majorer le prix d’acquisition des parts pour le calcul de la plus-value
Le prix d’acquisition pris en compte pour le calcul des plus-values immobilières des particuliers répond à la définition de l’article 150 VB du CGI.
Le II de l’article précise que pour les cessions d’immeuble, le prix d’acquisition est majoré des dépenses de travaux de construction, reconstruction, d’agrandissement ou d’amélioration supportées par le vendeur (i) lorsqu’elles n’ont pas déjà été prises en compte pour la détermination de l’IR (i.e. déduites au titre des revenus fonciers) et (ii) qu’elles ne présentent pas la nature de dépenses locatives.
En l’espèce, le contribuable, dans le cadre d’une cession de parts sociales de SCI, avait majoré le prix d’acquisition des parts du coût des travaux réalisés sur un immeuble détenu par celle-ci en avançant que les travaux n’avaient pas été amortis et n’étaient pas éligibles à un dispositif fiscal d’incitation à l’investissement locatif.
L’administration a remis en cause cette majoration et mis à la charge du contribuable un rappel d’IR (sur la plus-value immobilière) et de prélèvements sociaux. Une cession de parts de SCI ne peut en effet être assimilée à une cession directe d’un bien immobilier. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA de Paris, 31 mars 2021, n°20PA01456
Cession d’usufruit temporaire de parts de SCI – Une distribution occulte imposable pour le cédant est constituée en cas de prix de cession majoré sans aucune contrepartie pour le cessionnaire
Les rémunérations et avantages occultes sont considérés comme des revenus distribués selon l’article 111, c du CGI et imposés chez les associés de sociétés en tant que revenus de capitaux mobiliers, sur une base majorée de 25%.
Ainsi, lorsqu’une personne cède à titre onéreux un bien à une société pour un prix majoré, l’administration fiscale peut considérer que la société cessionnaire s’est rendue auteur d’un acte anormal de gestion, ayant consenti au cédant une libéralité représentant un avantage occulte. Pour le cédant, cet avantage peut s’analyser comme un revenu distribué imposable.
En l’espèce, une SCI dont M. B était associé minoritaire a, le 6 janvier 2012, acquis l’usufruit temporaire pour 10 ans des parts de deux autres SCI dont il était associé majoritaire.
En se basant sur le barème de l’article 669 du CGI, l’administration a considéré que le coût de cette acquisition avait été surestimé et a regardé l’écart entre le prix d’acquisition et le prix réel comme une libéralité constitutive d’un acte anormal de gestion pour la SCI cessionnaire et de revenus distribués pour les deux SCI dont M.B était associé.
Dans un arrêt en date du 1er avril 2021, la CAA de Nantes en se fondant sur une valorisation économique de l’usufruit, constate que cette méthode conduisait à une majoration significative de l’usufruit des parts des SCI, sans contrepartie pour le cessionnaire. Cet écart significatif, compte tenu de la communauté d’intérêts entre cédants et cessionnaire, constituait un avantage occulte imposable chez les deux SCI cédantes. Pour en savoir plus, consultez notre brève sur le sujet ici.
CAA de Nantes, 1er avril 2021, n°19NT01569
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