Nous le rappelions dans un précédent bulletin, les contribuables français qui possèdent des comptes ou des contrats étrangers doivent les déclarer à l’administration fiscale (art. 1649 A et suivants du CGI).
Si le compte étranger n’est pas déclaré et que le contribuable n’apporte pas de « justifications suffisantes » sur l’origine des fonds qui y figurent, l’administration est en droit de procéder à une taxation d’office, en vertu de l’article 755 du CGI, assise sur la valeur la plus élevée connue par l’administration fiscale au cours des dix années précédant l’envoi de la demande d’information ou de justification au taux de 60 % (droits de mutation à titre gratuit entre personne non parentes).
Ces dispositions, déjà jugées conformes à la constitution (Cons. Cont. 15 octobre 2021, n° 2021-939 QPC) sont validées par la Cour de cassation.
Dans les faits d’espèce, l’administration avait relevé, à l’occasion de l’examen de déclarations d’ISF, l’utilisation par une contribuable d’un compte ouvert à l’étranger et non déclaré dont les avoirs avaient pu atteindre la somme maximale de 4 282 922 €.
Si l’origine d’une partie de ces fonds avait été justifiée par une déclaration de don manuel consenti par la mère de la contribuable, l’administration avait estimé ne pas avoir reçu de justifications suffisantes pour un montant de 1 223 849 € et les avaient soumis par voie de taxation d’office aux droits de mutation à titre gratuit au taux de 60 %.
La demanderesse, déboutée en première instance et en appel, se pourvoie en cassation en estimant que le mécanisme de taxation précité serait contraire au droit communautaire (notamment au Protocole n°1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales) et présenterait une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux.
La Cour de cassation approuve l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Versailles en affirmant que les avoirs figurant sur un compte étranger sont réputés constituer un patrimoine acquis à titre gratuit et donc taxés au taux de droit commun le plus élevé lorsque le contribuable ne répond pas aux demandes d’information de l’administration fiscale quant à leur origine.
La Cour relève notamment que :
- Le recours à une présomption réfragable pour inciter les contribuables à faire preuve de transparence et à contribuer à un « meilleur civisme fiscal» correspond à un souci d’intérêt général et constitue une « juste atteinte à la propriété » au sens du Protocole cité ;
- La taxation selon taux de droit commun, applicable en dehors de tout contexte frauduleux, ne saurait constituer une sanction ;
- Au cas d’espèce, la demanderesse n’avait pas apporté de justifications suffisantes quant aux « modalités d’acquisition desdits avoirs et ne justifie donc pas selon quelles modalités juridiques ils sont entrés dans son patrimoine».
Si les contribuables seront rassurés de savoir qu’une taxation de 60 % de la valeur de fonds détenus à l’étrangers ne constitue pas, pour la Cour, une « sanction », il reste qu’il leur est souhaitable d’être en mesure de présenter des justifications « suffisantes » de l’origine précise des sommes en causes.
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