L’article 150-0 B ter du CGI permet, notamment et sous conditions, de bénéficier d’un report d’imposition de la plus-value constatée lors d’apport de titres de sociétés à une holding contrôlée par l’apporteur.
Le texte autorise la rémunération de l’apport pour partie par une soulte à la condition que celle-ci soit inférieure à 10 % de la valeur nominale des titres reçus. Avant 2017, une telle soulte bénéficiait elle-même du report d’imposition, et n’était donc pas imposable au moment de sa perception.
Néanmoins, comme prévu au Bofip et confirmé par la jurisprudence, l’administration se réservait le droit d’écarter cet avantage lorsque la soulte en question ne présentait pas de justification économique, en faisant application de la procédure d’abus de droit.
C’est ce qu’a confirmé récemment la Cour administrative d’appel de Paris, relevant que l’intention du législateur n’était pas respectée lorsqu’une soulte était attribuée dans l’unique but d’appréhender des liquidités en franchise d’impôts.
Au cas d’espèce, un contribuable avait, en 2015, classiquement apporté des titres de sociétés à une holding qu’il venait de créer et qu’il détenait à 100 %.
Le capital de la holding avait été fixé à environ 2 M€, alors que les titres apportés étaient valorisés à environ 2,2 M€. Le delta, légèrement inférieur à 10 % de la valeur nominale des titres émis par la holding, avait été compensé par le versement d’une soulte.
Le service vérificateur a mis en œuvre la procédure de l’abus de droit afin de remettre en cause le bénéfice du report d’imposition sur la soulte versée, considérant que celle-ci n’avait aucune autre justification que d’atténuer la charge fiscale.
En particulier, la Cour rejoint l’administration, relevant que le contribuable « était la seule partie au contrat d’apport, ce qui renforçait son pouvoir discrétionnaire quant aux apports effectués, et que la mise à disposition de la soulte en litige n’était pas justifiée par la nécessité de compenser un quelconque déséquilibre entre les actionnaires dans la parité d’échange ».
Ces éléments sont, selon la Cour, suffisamment précis et de nature à révéler l’intention du contribuable d’éluder ou atténuer ses charges fiscales normales, par une application littérale des textes contraire à l’intention du législateur.
Les arguments du contribuable justifiant l’opération d’apport n’ont pas emporté la conviction des juges puisque ne permettant aucunement de justifier la stipulation d’une soulte.
Le montant de la soulte a donc été imposé dans la catégorie des plus-values mobilières, régime applicable dès lors que l’apport en lui-même n’est pas remis en cause.
CAA Paris, 5e ch., 28 juin 2024, n° 22PA03676
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