Pour les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, le régime mère-fille permet d’éviter une double imposition puisque les produits de participation des sociétés filiales ne sont pris en compte dans le résultat imposable de la société mère que pour une quote-part de 5 % (art. 216 CGI).
Cette exonération, applicable dès la première année de détention, est toutefois conditionnée à la détention des titres de participation par la société-mère pendant une durée minimale de deux ans.
La question récemment soumise à la Cour administrative d’appel de Nancy était la suivante : En cas d’apport des titres de participation à une société en cours de formation, quel est le point de départ de ce délai de détention : la signature des statuts comprenant l’engagement d’apport des titres par l’associé ou l’immatriculation de la société ?
Dans l’arrêt du 21 décembre 2023, les juges tranchent clairement : c’est la date d’immatriculation de la société qui doit être retenue et non pas la date de l’apport. L’apport ne peut pas être considéré comme un acte réalisé au nom de la société et pouvant être repris par cette dernière, mais constitue plutôt un acte accompli par l’associée fondatrice.
Dans l’affaire, un contribuable s’était engagé, dans les statuts d’une EURL en cours de constitution le 30 avril 2014 (date de la signature des statuts), à apporter des titres de sociétés à cette EURL. Cette société, immatriculée le 4 août 2014, les avait cédés le 2 mai 2016 sous le régime mère fille considérant que le délai de 2 ans avait couru à compter de la signature des statuts.
À la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a remis en cause le régime d’exonération, estimant que le délai de détention n’avait pas été respecté.
Le contribuable se prévalait des dispositions de l’article L201-6 du Code de commerce selon lesquelles une société régulièrement immatriculée peut reprendre à son compte les engagements souscrits en son nom lorsqu’elle était en formation. Il convenait pour lui, en ce sens, de retenir la date de la constitution de cette dernière.
Toutefois, la CAA ne suit pas cette argumentation et rappelle que :
- La reprise d’actes ne porte que sur ceux réalisés au nom de la société en formation, et non sur ceux constitutifs de la société. En ce sens, la constitution d’apports forme bien l’une des conditions essentielles du contrat de société (réalisé par l’associée fondatrice) et ne peut constituer un acte accompli au nom d’une société en formation.
- Les Statuts de l’EURL prévoyaient que celle-ci serait titulaire de la propriété des parts apportées « à compter de son immatriculation au registre du commerce ».
La CAA confirme donc l’analyse de l’administration et remet en cause l’application du régime mère-fille puisqu’il s’était écoulé moins de deux ans entre la date d’acquisition des titres (l’immatriculation de la société) et la date de leur cession.
CAA Nancy, 21 décembre 2023, 22NC03166
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