Pour rappel, l’article 885-A du CGI prévoyait que « les couples mariés font l’objet d’une imposition commune » à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Par exception toutefois, les époux pouvaient faire l’objet d’une imposition distincte lorsqu’ils :
- (i) étaient séparés de bien et ne vivaient plus sous le même toit ;
- ou (ii) étaient en instance de séparation de corps ou de divorce et étaient autorisés à avoir des résidences séparées.
Ces dispositions ont été en tout point reprises par l’article 982 du CGI à propos de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).
Ainsi, lorsque les époux rentrent dans l’une ou l’autre de ces exceptions, chacun d’entre eux doit déclarer à l’ISF/IFI ses biens et droits immobiliers imposables, ainsi que ceux de ses enfants mineurs dont il détient l’administration légale des biens.
Dans sa décision en date du 31 août 2021, la CA d’Aix-en-Provence a précisé les éléments de preuves recevables que l’époux demandeur de l’imposition distincte à l’ISF doit apporter pour caractériser la résidence séparée des époux, et a jugé que le fait que les déclarations fiscales mentionnaient une adresse commune n’empêchait pas d’apporter une preuve contraire.
En l’espèce, une contribuable a fait l’objet d’un redressement fiscal au titre de l’ISF pour les années 2006 à 2012 : selon le fisc elle avait réalisé, à tort, une déclaration distincte de celle de son défunt époux.
Elle a contesté la taxation mise à sa charge en arguant du fait qu’elle ne vivait plus sous le même toit que son époux depuis 1998 et qu’elle disposait depuis d’une résidence distincte pour laquelle elle présentait de nombreux justificatifs.
Sa demande fut rejetée par le TGI d’Aix-en-Provence, lequel a jugé les justificatifs apportés insuffisants en raison notamment du fait que :
- Les déclarations d’impôt sur le revenu des époux mentionnaient, sur plusieurs années, le domicile, que la veuve déclare comme sa résidence principale, en résidence secondaire ;
- Les déclarations d’impôt sur le revenu de l’épouse, durant deux ans après le décès de son défunt mari, mentionnaient toujours cette résidence en résidence secondaire.
La Cour a estimé que la vie séparée des époux doit être appréciée au vu de l’ensemble des pièces permettant de prouver la réalité et l’effectivité de cette séparation, ensemble de pièces qui devait être pris en compte pour relativiser la portée des éléments résultant des déclarations d’IR faites au nom du couple mentionnant une seule adresse.
En effet, au cas particulier, la contribuable a présenté de nombreuses preuves de sa résidence séparée, telles que :
- La déclaration de succession mentionnant une résidence distincte entre celle de l’épouse et de ses enfants d’une part et celle du défunt mari d’autre part ;
- Des témoignages de voisins prouvant l’installation depuis de nombreuses années et de la compagne du défunt prouvant la séparation de logement ;
- Des factures d’assurance et de consommation d’eau à cette adresse depuis de nombreuses années, précédant même la période de contrôle ;
- La preuve de sa domiciliation à l’égard de la CPAM et de son employeur.
La Cour a donc donné raison à la contribuable qui avait apporté suffisamment d’éléments factuels et probants justifiant d’une résidence séparée de son défunt époux.
Arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 31 août 2021, n° 18/18315
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