Un arrêt rendu par la CAA de Paris le 17 mai dernier démontre parfaitement l’intérêt qu’a l’Administration d’interagir avec la procédure pénale pour bénéficier d’un droit de reprise élargi.
L’article L. 188 B du LPF prévoit qu’en cas de plainte pour fraude fiscale déposée dans le délai de reprise de droit commun, le délai de reprise est allongé jusqu’à la fin de l’année qui suit la décision mettant fin à la procédure et, au plus tard, jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.
En l’espèce, un contribuable et une société étaient associés dans une autre société qui a été cédée à un tiers. L’Administration a estimé que le contribuable avait appréhendé en 2007 la plus-value afférente à sa part dans le capital de la société cédée, mais également celle réalisée par la société, sans l’avoir déclarée.
Quelques jours avant l’expiration du délai de reprise de droit commun qui expirait au 31 décembre 2010, l’Administration avait déposé une plainte pour fraude fiscale. En 2015, l’Administration émettait une première proposition de rectification en se plaçant sur le terrain de l’abus de droit fiscal. Puis par une seconde proposition de rectification émise en 2018, qui a annulé et remplacé la précédente, le service notifiait au contribuable les mêmes rectifications, cette fois-ci selon la procédure contradictoire. Trois mois plus tard, à la fin de l’année 2018, le contribuable était définitivement condamné devant le juge pénal. Les impositions rectifiées ont été mises en recouvrement fin 2018.
Devant la Cour administrative d’appel, le contribuable soutenait un moyen relatif à la prescription, en estimant que la date butoir de l’article L. 188 B du LPF était dépassée puisque l’impôt en litige concernait l’année 2007 et la seconde proposition de rectification datait de 2018. Il estimait que le délai de 10 ans de l’article L.188 B était donc échu.
Dans un arrêt du 17 mai 2024, la Cour administrative d’appel de Paris a écarté ce moyen en estimant que « l’allongement du délai de reprise par l’effet des dispositions de l’article L. 188 B du livre des procédures fiscales ne saurait priver l’administration de la faculté d’interrompre ce délai par une proposition de rectification, laquelle a pour effet d’ouvrir à nouveau le même délai ».
Les poursuites pénales ayant été engagées avant l’expiration du délai de reprise de droit commun, la première proposition de rectification avait régulièrement interrompu la prescription, ouvrant un nouveau délai de même durée, peu important à cet égard que les motifs de cette seconde proposition aient été modifiés.
En conséquence, à la date de la seconde proposition de rectification, la prescription n’était donc pas acquise. Cette deuxième proposition de rectification a elle-même interrompu la prescription, si bien que l’Administration pouvait parfaitement mettre en recouvrement les impositions à cette date.
CAA de Paris, 9ème chambre, 17 mai 2014, n°21PA06237
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